[Traduction : EPALE France]

Article de Dorthe Kirkgaard Nielsen pour EPALE Danemark – cf linkedin https://www.linkedin.com/in/dorthe-kirkgaard-nielsen-b491366/.

Lorsque l'on parle de formation tout au long de la vie, d'employabilité et de micro-crédits dans le contexte de l'UE, il suffit de jeter un coup d'œil au système danois de l’AMU. Depuis 1960, l’AMU - Arbejdsmarkedsuddannelser (Formation sur le marché du travail) - offre aux travailleurs qualifiés et non qualifiés du marché du travail danois une formation continue et un développement des compétences. Ce système, qui s'adresse aux citoyens les moins instruits, vise à aider sans relâche les travailleurs qualifiés et non qualifiés à développer leurs compétences professionnelles afin qu'ils puissent répondre aux exigences du marché du travail. C'est un système qui leur permet d'acquérir les qualifications et les compétences dont le marché du travail a besoin, dans l'intérêt des individus, des entreprises et de la société. « Le système danois de l’AMU a été créé lorsque nous sommes passés d'une société agricole à une société industrielle, car nous avons réalisé que nous devions développer les compétences de la main-d'œuvre passant de l'agriculture à l'industrie. S'ils ne développaient pas leurs compétences, les individus se retrouveraient dans une situation difficile, puisqu'ils n'auraient pas les compétences nécessaires pour trouver un emploi, et les entreprises ne seraient pas en mesure de trouver suffisamment de travailleurs qualifiés », explique Peter Thomsen, directeur d'AMU Nordjylland.

« Depuis lors, le système de l’AMU a été utilisé pour améliorer continuellement les compétences des travailleurs qualifiés et non qualifiés pour la société de services, la numérisation et maintenant la transition écologique. Le système de l'AMU joue un rôle important dans le modèle danois de "flexicurité", car ce système unique permet de former rapidement la main-d'œuvre à l'aide de formations abordables et géographiquement accessibles, dans l'intérêt des individus, des entreprises et de la société », poursuit-il.

Une multitude de cours différents et de formations professionnelles courtes

Grâce au système de l’AMU, les travailleurs et les chômeurs peuvent accéder à toutes sortes de formations : des cours de courte durée d'une demi-journée, d'une journée ou de plusieurs semaines, mais aussi des programmes de formation complets comprenant jusqu'à 90 jours de cours assurés par l’AMU. Vous pouvez suivre des cours d'hygiène alimentaire, obtenir des certificats pour le secteur des transports, l'industrie métallurgique, le secteur de la construction, etc. et suivre des cours d'informatique, de développement du personnel, de danois, d'ergonomie et de bien-être, de sécurité, de biodiversité dans le jardin paysager, de reconversion dans le secteur social et bien plus encore. Vous pouvez également combiner des programmes entiers. Par exemple, il faut trois cours de l'AMU sur une durée totale de 33 jours pour devenir câbleur qualifié si vous n'avez aucune expérience dans l'industrie électrotechnique. Vous pouvez également suivre une formation de finisseur béton en conjuguant travail en entreprise et participation à six cours de l'AMU sur trois semaines. Le système de l'AMU propose ainsi une formation professionnelle plus courte aux personnes qui ne souhaitent pas ou qui, en raison de leur situation personnelle, ne peuvent pas suivre des programmes de formation plus longs. Les cours peuvent être réservés par les entreprises, par les agences pour l'emploi et par les particuliers.

Un certificat pour chaque cours achevé

Les cours de l'AMU sont à la fois pratiques et théoriques, avec un fort accent sur les ateliers pratiques, et les programmes peuvent être suivis à temps partiel ou à temps plein. Ils peuvent avoir lieu dans les écoles, sur le lieu de travail et également en ligne pour certaines matières. Tous les cours de l'AMU sont certifiants. Les apprenants reçoivent un certificat pour chaque cours achevé, et certains des cours peuvent donner droit à des crédits pour une formation professionnelle. Parallèlement, chaque participant à un cours peut bénéficier d'un bilan de compétences individuel, ce qui lui permet d'élaborer un programme sur mesure basé sur un véritable bilan de compétences. « Le système de l'AMU est très flexible, car les participants peuvent choisir exactement ce dont ils ont besoin. De plus, les cours de l'AMU peuvent être entièrement adaptés aux besoins de chaque entreprise, et les participants reçoivent ensuite un certificat attestant de leurs compétences », souligne M. Thomsen.

Aussi facile à assembler que des briques de Lego, selon les besoins de chacun

L'idée de base du système de l'AMU est de créer une forme de formation subventionnée par l'État qui permet de soutenir la formation continue des travailleurs qualifiés et non qualifiés qui n'ont pas encore payé pour une formation continue. « Le système de l’AMU est conçu pour former des travailleurs non qualifiés à des tâches spécialisées et pour répondre aux besoins du marché du travail. C'est un système incroyablement agile car vous pouvez combiner les nombreux cours de l’AMU comme des briques de Lego en fonction des besoins de l'individu ou de l'entreprise », explique Lotte Mollerup, consultante en chef chez Danske Erhvervsskoler og Gymnasier. 

 « Le système est bien adapté à l'évolution du marché du travail, et de tous nouveaux cours peuvent être élaborés en peu de temps - six semaines seulement si un besoin soudain émerge. Grâce à l'AMU, les individus et le marché du travail peuvent acquérir de nouvelles compétences relativement vite afin de se préparer à leur futur emploi », poursuit-elle.

Développer ses compétences devient presque gratuit grâce aux subventions de l'État

Outre la réorganisation rapide, le système de l’AMU offre également aux entreprises une planification stratégique et à long terme autour du développement des compétences des employés. Pour Lotte Mollerup, l'accessibilité financière est l'une des grandes forces de l'AMU. Il faut compter généralement 650 DKK pour un cours d'une semaine de l'AMU, et entre 128 et 192 DKK par jour. Pour des cours spécifiques, il peut y avoir un supplément allant jusqu'à 700 DKK par semaine. « Mais quoi qu'il en soit, c'est abordable car les cours sont subventionnés par l'État. De plus, les entreprises ou les employés perçoivent une compensation financière pendant le cours. Le logement et la nourriture sont également pris en charge si un cours n'est disponible que dans une école éloignée du domicile des participants. Développer ses compétences est donc presque gratuit », explique Mme Mollerup.

Favoriser la croissance et le progrès

Elle ne doute pas que le système de l'AMU contribue à la croissance et au progrès du Danemark. « Le fait que nous disposions d'un système agile offrant une formation continue abordable, de qualité et géographiquement accessible est très profitable aux individus, au marché du travail danois et à l'ensemble de la société », déclare Mme Mollerup. Aujourd'hui, l’AMU propose environ 3 000 cours dans les écoles professionnelles et les écoles AMU du Danemark. En plus de se concentrer sur le marché du travail à un niveau sociétal général, les cours de l'AMU sont également destinés aux marchés du travail locaux avec une offre de programmes adaptés aux besoins locaux. Les différents prestataires de l'AMU entretiennent un dialogue étroit avec les entreprises et les agences pour l'emploi locales afin d'élaborer des programmes adaptés aux salariés et aux chômeurs d'une région donnée et de s'assurer que les compétences professionnelles nécessaires sont bien disponibles.

Les prestataires de l'AMU entretiennent un dialogue étroit avec les entreprises locales

En tant que prestataire de l'AMU, le CELF, Center for Erhvervsrettede Uddannelser Lolland Falster (Centre de formation professionnelle de Lolland Falster), a coopéré étroitement avec les agences pour l'emploi et les consortiums sur le lien fixe du Fehmarn Belt. Le dialogue s'est concentré sur le développement des compétences des chômeurs et des personnes déjà employées sur le chantier du pont et du tunnel reliant le Danemark à l'Allemagne. En collaboration avec la joint-venture Femern Link Contractors et les agences pour l'emploi locales, le CELF a élaboré un module de cours de l'AMU destiné à former une équipe de monteurs pour le montage des halls d'usine. Des cours spéciaux ont été conçus pour les conducteurs, les opérateurs de machines, les monteurs et le personnel logistique qui travailleront sur le lien fixe du Fehmarn Belt. En collaboration avec les agences pour l'emploi des municipalités de Guldborgsund et de Lolland, le CELF a conçu le programme « Votre voie vers le secteur de la construction », destiné aux travailleurs potentiels non qualifiés qui travailleront sur le lien fixe du Fehmarn Belt. « En tant que prestataire de l'AMU, nous pouvons concevoir et adapter complètement nos programmes aux besoins des employeurs en créant des modules de différents cours de l'AMU. Notre mission est de soutenir la communauté économique locale, en collaboration avec les entreprises et les pouvoirs publics, et "Votre voie vers le secteur de la construction" est un exemple de cours adapté aux besoins prévus de notre région », explique Michael Bang, PDG du CELF.

L’AMU est là pour contrer la pénurie de main-d'œuvre

La vaste construction autour du Fehmarn belt risque également de créer une sorte de vide pour les autres entreprises de la région qui ne sont pas du tout associées à la construction, puisque tous les travailleurs sont attirés par le lien fixe du Fehmarn belt. Cela signifie que les entreprises risquent de ne plus trouver de travailleurs. Le CELF contribue également à relever ce défi grâce à ses cours de l'AMU. Le CELF a notamment conçu un programme de formation spécial pour un industriel local qui licencie habituellement ses employés pendant la saison creuse. Cette année, l'entreprise a décidé d'envoyer ses employés suivre un cours de développement des compétences axé sur cinq processus : la maintenance, la production allégée, la qualité, la coopération et la sécurité. « C'est ainsi que nous soutenons notre communauté économique locale - en améliorant les compétences des employés et en veillant à ce que les entreprises puissent conserver des travailleurs compétents et qualifiés », explique M. Bang.

Développement des compétences pour d'autres emplois et secteurs

Le système de l'AMU joue un rôle important dans le chômage saisonnier, cyclique et structurel. Le dialogue étroit avec les entreprises, les syndicats, les agences pour l'emploi, etc. permet de former un plus grand nombre de travailleurs non qualifiés à un niveau qualifié et garantit que les groupes de travailleurs qualifiés qui changent de secteur sont formés dans de nouveaux domaines. L'usine d'électronique Flextronics, située à Pandrup, dans le nord du Jutland, a par exemple commencé par réduire ses effectifs de plus de 1 000 employés, avant de fermer et de licencier les 330 employés restants. « Dans ces situations, nous mettons en œuvre le programme de l'AMU et  concevons des programmes sur mesure pour développer rapidement les compétences de tous les employés licenciés afin qu'ils soient qualifiés pour d'autres emplois et d'autres industries », explique Peter Thomsen de l'AMU Nordjylland. À ses yeux, le lien étroit avec les marchés du travail locaux est une grande force, car cela oblige les prestataires de l'AMU à dialoguer étroitement avec les autorités et les entreprises locales.

La grande accessibilité géographique est un atout majeur

Par ailleurs, les distances relativement courtes pour atteindre les prestataires de l'AMU constituent, selon lui, un grand avantage. « Le fait de pouvoir développer de nouvelles compétences près de chez soi est une force indéniable, car les travailleurs non qualifiés ne sont pas les personnes les plus mobiles. Dans les écoles, nous travaillons aussi beaucoup sur la motivation, car pour certains, l'école est synonyme de mauvaises notes, de mauvaises expériences et d'échec », explique M. Thomsen. « Ici, à l'AMU, l'expérience se veut totalement différente, et les programmes peuvent être adaptés à l'individu et à ses besoins pour que l'expérience soit fructueuse. Nous pouvons ainsi élever le niveau d'éducation des personnes et, plus largement, de la société », poursuit-il.

Les employeurs et les employés participent à l'élaboration des cours de l'AMU

Tous trois estiment également que le large éventail de cours (plus de 3 000) constitue une grande force, même si certains d'entre eux ne sont pas dispensés en raison du manque de participants. Ils soulignent en outre la façon dont le système de l'AMU est ancré. Le système de l'AMU est défini dans la législation sur le marché du travail, mais il fait partie du ministère danois de l'Éducation. Les cours/programmes de formation sont conçus et organisés sous forme de formules spécifiques de formation continue grâce à une étroite collaboration entre le ministère, les employeurs et les employés. Les cours de l'AMU sont constamment mis à jour en fonction des besoins et se basent sur les dernières théories et méthodes d'apprentissage pratiques dans chaque domaine. « Le fait de pouvoir bénéficier d'un contrôle de qualité de la part de l'État et des comités de formation continue professionnelle et de ne pas pouvoir mettre en place un cours de l'AMU sans autorisation constitue un autre atout de ce système », déclare Bang, PDG du CELF.

 « Il ne s'agit donc pas d'une formation quelconque dispensée par un prestataire privé. Il s'agit de cours liés à une formation professionnelle régulière où les participants obtiennent une certification de leurs compétences. Elle peut servir de crédit pour des cours professionnels, faciliter la recherche d'un emploi et assurer une main-d'œuvre qualifiée », poursuit-il.

CELF