Féministes contre le cyberharcèlement est un collectif féministe intersectionnel, constitué en association loi de 1901 depuis mai 2017, et mobilisé contre les violences faites aux femmes, aux filles et aux personnes LGBTQIA+ via les outils numériques. Le collectif s’est donné pour objectifs de sensibiliser l’opinion et les réseaux sociaux au cyberharcèlement et aux cyberviolences, d'orienter les victimes et de les informer sur les recours possibles.

Laure Salmona et Ketsia Mutombo, deux des co-fondatrices du collectif, ont publié en septembre 2023 Politiser les cyberviolences. Une lecture intersectionnelle des inégalités de genre sur Internet aux éditions du Cavalier bleu.

Dans la lignée du travail de Féministes contre le cyberharcèlement, cet ouvrage est un outil précieux de compréhension et de défense.

Comme toute technologie, le Web est intrinsèquement ambivalent. Les autrices montrent bien comment il a contribué à permettre aux groupes sociaux marginalisés (femmes lesbiennes, bi, trans, handicapées, racisées, précaires, victimes de violences sexuelles…) de se faire entendre et de s’organiser mais aussi comment il fait peser sur ces mêmes groupes des violences accrues s’inscrivant dans un continuum avec l’espace physique (dans 72% des cas les violences en ligne se poursuivent dans l’espace physique (1)). A titre d’exemple, la misogynoir, forme de misogynie dirigée spécifiquement par les femmes noires s’observe ainsi de manière particulièrement violente sur les réseaux sociaux, en particulier envers les militantes antiracistes.

La parution de cet ouvrage à l’heure du développement des IA génératives est plus qu’opportun. Les images générées par ces technologies font en effet peser des menaces telles qu’il difficile, à ce jour, de prendre la mesure des conséquences qu’elles pourraient avoir pour les personnes qui en seraient victimes (et qui sont, dans une immense majorité, des femmes…) et de s’en prémunir comme en témoigne cet enquête récente de France TV Info. Les deepfakes pornographiques viennent en effet s’ajouter à un arsenal déjà fourni des harceleurs en ligne (stalking, doxxing…) et la rapidité du développement de ces technologies fait peser des menaces accrues sur les femmes tout particulièrement.

On parle beaucoup des potentialités que peuvent représenter les technologies d’intelligence artificielle générative dans l’éducation et la formation. Le livre de L. Salmona et K. Mutombo souligne, quant à lui, la nécessité de sensibiliser et d’éduquer aux multiples aspects et conséquences de ces technologies car comme le montre bien Laure Salmona dans cette interview du podcast Kiffe ta race ! “derrière les cyberviolences il y a un projet politique qui est de faire taire les femmes et les groupes minorés et d’autant plus les femmes issues de groupes minorés”.

(1) source : Enquête IPSOS pour Féminises contre le cyberharcèlement, novembre 2022.