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Santé mentale des jeunes

Construire des réponses éducatives et sociales avec Erasmus+

La santé mentale des jeunes s’est imposée comme une urgence silencieuse. Depuis plusieurs années, les signaux d’alarme se multiplient : augmentation des troubles anxieux, isolement, souffrance psychologique, décrochage scolaire ou social… 

Ces phénomènes, loin d’être marginaux, touchent aujourd’hui toutes les franges de la jeunesse, avec une intensité encore accrue chez les jeunes en situation de précarité, d’exclusion ou de transition. 

En France, cette réalité a conduit à ériger la santé mentale en Grande cause nationale pour l’année 2025, avec pour ambition de libérer la parole, de combattre les stigmatisations et de promouvoir des réponses transversales, éducatives, sociales et citoyennes.

Dans ce contexte, le programme Erasmus+ représente un levier stratégique encore trop peu mobilisé. Plus qu’un instrument de mobilité, il constitue un espace d’innovation sociale, d’éducation inclusive et de transformation collective. 

À travers ses différentes actions – mobilités, partenariats, formation des professionnels – Erasmus+ peut contribuer à façonner des environnements bienveillants où la santé mentale est pensée non pas comme une problématique médicale isolée, mais comme une dimension intégrée du bien-être éducatif.

 

Une jeunesse en quête d’écoute, de confiance et de sens

La détresse psychologique qui touche aujourd’hui une partie importante des jeunes européens n’est pas un phénomène conjoncturel. Elle s’ancre dans une série de crises successives – sanitaire, climatique, sociale, géopolitique – qui ont fragilisé les repères, amplifié les incertitudes et nourri un sentiment diffus d’impuissance. 

Pour de nombreux jeunes, la perte de confiance en l’avenir s’accompagne d’un mal-être profond, souvent silencieux, et parfois invisible aux yeux des institutions. Ce mal-être ne se limite pas aux sphères personnelles : il entrave l’apprentissage, freine l’engagement, fragilise l’insertion et isole ceux qui le vivent.

Or, dans les politiques publiques comme dans les dispositifs éducatifs, la santé mentale reste encore trop souvent reléguée à la marge, ou confiée aux seules structures spécialisées. Il est pourtant urgent de l’aborder comme un enjeu éducatif à part entière, transversal à l’ensemble des parcours d’apprentissage et de vie. C’est ici qu’Erasmus+, avec son ancrage dans l’éducation non formelle, la coopération transnationale et la formation continue, peut jouer un rôle moteur.

Erasmus+ : un cadre éducatif pour prendre soin

Nombre de projets Erasmus+ ont déjà démontré leur capacité à offrir aux jeunes des expériences profondément transformatrices. Les échanges de jeunes, les activités de participation ou les mobilités de courte durée sont autant d’espaces où les participants peuvent se décaler de leur quotidien, s’ouvrir à d’autres cultures, expérimenter d’autres rapports aux autres… et parfois se reconstruire. Ces projets sont d’autant plus puissants lorsqu’ils sont pensés comme des espaces sécurisants, où l’on peut apprendre à mieux se connaître, exprimer ses émotions, retrouver de la confiance et du pouvoir d’agir.

La méthode pédagogique propre à Erasmus+ – basée sur la coopération, la communication bienveillante, l’apprentissage par l’expérience – est parfaitement adaptée à ces enjeux. 

Elle permet d’aborder les émotions, les relations, les doutes, les tensions… non pas comme des obstacles, mais comme des matières éducatives à part entière. De nombreux porteurs de projets intègrent déjà des pratiques inspirées de la psychologie positive, de la médiation, de l’art-thérapie ou du sport comme outil de rééquilibrage. Il ne s’agit pas de médicaliser les projets, mais au contraire d’y faire place à l’humain dans toutes ses dimensions, y compris la plus fragile.

 

Former les adultes pour mieux accompagner les jeunes

La santé mentale des jeunes dépend aussi de la capacité des adultes à créer des environnements bienveillants, à écouter sans juger, à repérer les signaux faibles, à orienter sans exclure. Dans ce domaine, l’éducation des adultes, autre pilier du programme Erasmus+, joue un rôle fondamental. Les professionnels qui entourent les jeunes – éducateurs spécialisés, animateurs, formateurs, médiateurs, acteurs de l’insertion ou de la prévention – sont souvent en première ligne face à la détresse psychique. Pourtant, ils sont rarement formés pour y faire face.

Grâce aux actions de mobilité pour les professionnels (KA122), aux partenariats de coopération (KA220), ou aux projets sectoriels dans l’économie sociale et solidaire, Erasmus+ permet à ces adultes d’acquérir de nouvelles compétences en matière d’accompagnement psychosocial, de médiation interculturelle, ou d’éducation émotionnelle. Il soutient également la mutualisation d’outils, la co-construction de dispositifs pédagogiques, la création de communautés de pratiques à l’échelle européenne. En renforçant la posture éducative des adultes face à la souffrance psychologique, le programme contribue ainsi à tisser une culture du soin éducatif, partagée, durable et ancrée localement.

 

Innovation sociale et co-construction : des réponses concrètes

Le programme Erasmus+ constitue aussi une formidable plateforme d’innovation sociale. Les partenariats de coopération permettent de réunir des acteurs aux compétences complémentaires : associations de jeunesse, centres de formation, universités, collectivités, professionnels de santé mentale, artistes, coachs… Ensemble, ils inventent des réponses nouvelles, croisent les regards, explorent des méthodes hybrides qui mêlent numérique, expression artistique, pair-aidance, dialogue interculturel, et inclusion.

De nombreux projets en Europe ont ainsi donné naissance à des podcasts réalisés par des jeunes sur leur rapport au bien-être, à des jeux pédagogiques sur les émotions, à des plateformes d’accompagnement entre pairs, à des ressources éducatives libres pour les enseignants, ou encore à des parcours immersifs mêlant mobilité, pleine conscience et engagement environnemental. Tous partent d’un même postulat : la santé mentale est une question collective, éducative, politique, et profondément sociale.

 

Une responsabilité collective à faire vivre dans les projets

À l’heure où la santé mentale est reconnue comme une Grande cause nationale en France, et alors que les jeunes expriment un besoin urgent d’écoute, d’accompagnement et de sens, il est essentiel que les porteurs de projets Erasmus+ s’emparent pleinement de cette question. Cela ne signifie pas transformer les projets en espaces thérapeutiques, mais bien intégrer le bien-être comme une boussole transversale : dans la façon de concevoir les activités, dans les outils d’évaluation, dans la manière d’accompagner les parcours, de gérer les conflits, de reconnaître les fragilités comme des expériences d’apprentissage.

Il s’agit aussi de faire en sorte que les jeunes ne soient pas seulement les bénéficiaires, mais aussi les co-auteurs des projets. Lorsqu’on leur donne les moyens de s’exprimer, de créer, de proposer, d’agir, on restaure leur capacité à faire face, à transformer leur vécu, à prendre soin des autres… et d’eux-mêmes.

 

Bâtir une Europe du care éducatif

La santé mentale des jeunes, en tant que priorité éducative et sociale, doit trouver sa place dans toutes les dimensions du programme Erasmus+ : jeunesse, éducation des adultes, coopération intersectorielle, innovation sociale. Elle doit devenir un enjeu partagé, transversal, pleinement reconnu dans les priorités stratégiques et les grilles d’évaluation. Elle peut aussi être le socle d’une nouvelle dynamique : celle d’une Europe du care éducatif, fondée sur la bienveillance, l’écoute, la coopération et la créativité.

Dans cette perspective, EPALE a un rôle clé à jouer : mettre en lumière les initiatives exemplaires, valoriser les porteurs de projets engagés, créer des ponts entre les mondes de la santé, de l’éducation et du social. Car ce qui se joue aujourd’hui dans la manière dont nous prenons soin de la jeunesse, c’est aussi l’avenir de notre capacité collective à éduquer, à inclure, et à espérer.

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