Tiers-lieux, fabriques de territoires et fabriques numériques : initiatives et développement
Depuis plusieurs années, le monde de la formation s’intéresse aux tiers-lieux et aux nouvelles nouvelles d'apprendre dans ces espaces.
Un intérêt croissant
L’attention pour le développement des tiers-lieux et de leurs impacts, tant en terme de développement territorial que de diversification des modalités de travail et de formation, n’est pas d’aujourd’hui. En 2018, l’étude sur les tiers-lieux réalisée par la Fondation travailler autrement avait répertorié en France près de 1800 tiers-lieux dont 46 % se situaient en dehors des métropoles. En effet, l’émergence de ces tiers-lieux s’inscrit dans un mouvement de fond touchant l’ensemble du territoire, à l’origine de dynamiques économiques et sociales nouvelles : nouvelles manières de travailler (télétravail, travailleurs indépendants) ; développement d’activités de proximité qui encouragent les circuits courts. Ces lieux sont des acteurs essentiels de la transition numérique et écologique dans les territoires. Ils sont devenus des plateformes de services qui contribuent à la vitalité de tous les territoires : ruraux, péri urbains, urbains, quartiers de la politique de la ville...
Le monde de la formation s’y intéresse depuis plusieurs années. Nous avons consacré la rencontre thématique EPALE d’octobre 2019 au thème des « Tiers-lieux apprenants » qui a donné à voir la vitalité des initiatives et leurs impacts tant sur la mobilisation du public et des acteurs que sur la conception et l’expérimentation de nouvelles manières d’apprendre dans une logique du « pour tous ».
Un appel à manifestation d’intérêt
A la lumière de ce développement, le Gouvernement a lancé, en juillet 2019, un appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour encourager la dynamique des tiers-lieux dans les territoires. Doté de 45 millions d’euros, il visait à identifier d’ici 2022, 300 fabriques de territoire, existantes ou en projet, dont 150 seront implantées en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et 150 dans les territoires ruraux.
L’État va ainsi soutenir à hauteur de 75 000 à 150 000 euros, sur trois ans, les fabriques de territoire, le temps pour ces structures de conforter leur équilibre économique. Le financement proposé par l’État tient compte de l’offre de services et du lieu d’implantation. La liste des 80 premières fabriques retenues au titre de cet AMI, toutes déployées dans des quartiers prioritaires de la politique de ville, a été publiée. Parmi elles :
48 fabriques de territoire bénéficieront du soutien de l’État. Une fabrique de territoire aura ainsi un rôle de mise en commun, porté vers la création d’activités, les coopérations entre acteurs et le développement local, bénéficiant à l’ensemble de l’écosystème qui anime le territoire. Une fabrique de territoire est donc un tiers-lieu « tête de réseau » qui joue un rôle de lieu ressources pour les porteurs de projets environnants ; lieu de formation et d’apprentissage par le « faire ensemble » ; lieu d’inclusion numérique pour les populations éloignées d’Internet et de ses nouvelles opportunités. Ces lieux bénéficieront notamment d’une subvention d’amorçage de l’État pouvant aller jusqu’à 50 000 euros par an sur trois ans ;
32 fabriques numériques de territoire proposeront de nombreuses activités autour du numérique aux habitants et professionnels du territoire. Elles seront soutenues, en plus de la subvention d’amorçage pouvant aller jusqu’à 50 000 euros par an sur trois ans, par un bonus financier de 100 000 euros par tiers-lieu.
L’AMI est d’ailleurs ouvert jusqu’en 2021 et les deux prochaines vagues se clôtureront le 30 mars et le 20 juin 2020, les porteurs de projets peuvent déposer leur dossier auprès du programme « Nouveaux lieux, Nouveaux liens » de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) www.societenumerique.gouv.fr/tierslieux. Ils seront accompagnés par France tiers-lieux, l’association nationale d’appui aux porteurs de projets.
Un enjeu de développement et un appui aux acteurs
L’objectif est de développer ces fabriques dans les territoires qui en sont dépourvus. L’enjeu, on le voit, est à la fois quantitatif et qualitatif. Il suppose d’appuyer les initiatives locales et les acteurs de terrain plutôt que de prescrire d’en haut des modèles à dupliquer. À l’heure des grandes transitions démographique, numérique, écologique et productive, le Gouvernement décide de soutenir ces initiatives publiques et privées en adoptant une nouvelle méthode d’intervention : sans prescrire, sans chercher à normaliser mais en accompagnant, en accélérant et en « outillant » l’ensemble des acteurs.
Perspectives
Comme le soulignait Denis Cristol dans l’interview qu’il nous a donné pour Epale, il nous faut être attentifs aux espaces facilitant l’acte d’apprendre. Et donc le développement des compétences est conditionné par une réflexion sur la conception de lieux multimodaux, ouverts et flexibles où la coopération dans le faire ensemble est la clé de mobilisation du public et des acteurs du territoire. Et où le bien commun est toujours présent. Cela interroge clairement l’ingénierie de formation. L’équité sociale est sans doute à ce prix : être capable collectivement de mixer à la fois une attention aux contenus à transmettre, aux mises en scènes pédagogiques à construire et aux espaces d’apprentissages facilitants qui seront nécessairement coopératifs et hybrides. Et ancrés sur les territoires. De beaux enjeux et un défi stimulant !
Fabriques de territoire et fabriques numériques Faire ensemble pour mieux vivre ensemble. L’étude des tiers-lieux réalisée par la fondation Travailler autrement Rencontre thématique EPALE « Les tiers-lieux apprenants » le 30 octobre 2019 Konk Ar Lab : fabriquer et apprendre ensemble : un Fab Lab au service de tous Des tiers-lieux apprenants : l’interview de Denis Cristol https://epale.ec.europa.eu/fr/blog/des-tiers-lieux-apprenants-linterview-de-denis-cristol |